Origine du nom de la commune Ste Anastasie

 

Un jour ou l’autre, nous nous posons tous la question sur l’origine d’un nom. C’est le cas pour Ste Anastasie. En général,  pour un  nom de commune, on retrouve l’origine assez facilement car il est lié à l’histoire, une histoire, voire une légende. Pour notre commune c’est un peu plus complexe. Nous allons donc remonter dans le temps pour essayer de comprendre pourquoi « Ste Anastasie » alors qu’il n’y a pas de village Ste Anastasie à proprement parlé. Il est à peu près certain que l’origine remonte aux environs du Vème siècle de notre ère. Voici mon cheminement basé sur la recherche de textes anciens et le recoupement de documents de toutes natures. Pour des questions de répétitions Ste Anastasie sera Ste A dans la suite du texte.

Nous relevons pour la première fois le nom de Ste A vers l’an 951 dans un acte de donation. Le  seigneur d’Aubarne, Amaury, comte d’Uzès, fait donation des domaines de Ste A, de Campagnac et du village d’Aubarne. Cette donation est faite au profit de l’abbaye de Cluny pour « le repos des âmes du comte, de la comtesse Ermengarde et du jeune Bermond ». L’approche de l’an mille fait peur, ce type de donation est fréquent. On retrouvera par la suite le nom de Ste A dans divers diplômes, notamment pour le fort de Ste A. Mais ce nom désignera un domaine et un mandement1, jamais un village. 0n trouve effectivement dans un livre de Germer Durand  que Ste A est le nom du village sis au pied du fort (Castellas) et qu’après la destruction du fort en 1633, les habitants de ce village auraient migré pour former les locus de Russan, Aubarne, Vic, Campagnac. Mais il n’en est rien. Déjà en 1547, le premier compoix du « mandement de Ste A et de Seynes » mentionne l’existence de  ces hameaux et villages. Et encore une fois, il n’y est pas mentionné de village de ce nom.

Alors pourquoi le nom de Ste A ? Plusieurs « Anastasie » ont existé entre les IIIème siècle et  Vème Siècle. Si on analyse bien la vie de ces Saintes, on s’aperçoit qu’elles ont toutes, sans exception, la particularité de s’être « mises au désert », exilées en quelque sorte. Or tous les textes connus concernant la description de notre territoire décrivent ces lieux comme étant « au bout du monde », « au désert », « si isolé ». Un des premiers textes connus écrit par l’évêque Amiel II (896), quand il va « donner » à des moines ermites les actuelles terres de Campagnac, dit « ces terres situées au bout du monde, si isolées ». Plusieurs auteurs, à travers les siècles, nous décrivent ces lieux comme particulièrement isolés (Sidoine Apollinaire, Jordan, Racine, Frossard, Boucoiran, Gide, Reclus…etc.). En ces temps, le territoire de l’actuelle commune est constitué de deux domaines Campagnaco et Marbaco. Les moines copistes commencent à écrire la vie des Saints et des saintes. C’est la période à laquelle on donne leurs  noms à d’innombrables lieux dans la région. Nous voyons donc apparaître le nom de Ste Anastasie.

Mais nous n’avons pas complètement résolu la question de ce choix. Deux fiscus2 forment grosso modo le territoire actuelle de notre commune : Campagnaco et Marbaco (Marbacum). Apparemment ces deux fiscus seraient eux-mêmes issus de deux domaines gallo-romains : Prussianum et Voroangus (Sidoine Apollinaire, Vème siècle). Mais c’est là l’objet d’un autre chapitre. Revenons à Marbaco. Ce nom apparait pour la première fois, nous l’avons vu, en 896. Soit après la longue période dévastatrice des grandes invasions (La dernière datant de 924 dans la région). Marbaco peut se traduire par lieu désert, lieu mort voire cimetière. Une cinquantaine d’années plus tard (941), on voit le nom de Ste A apparaître remplaçant Marbaco ou Marbacum dans les documents. Voici donc résumé, d’après mes recherches et documents, l’origine du nom de notre fantastique territoire qui, croyez-moi,  n’a pas fini de nous étonner.

1 Mandement : territoire qui regroupait plusieurs paroisses ayant des intérêts en commun – 2 Fiscus : territoire fiscal               

Patrice Hurlin   marbacum.fr